Le premier tour des Municipales devrait être annulé

Emmanuel Macron le 16 mars 2020

Campagne perturbée, abstention record et illégitimité du scrutin

L’épidémie du Coronavirus a entraîné des mesures de précaution et une hypermédiatisation du phénomène qui ont considérablement gêné la campagne électorale et favorisé la chute de la participation en France. En effet, seuls 44% des électeurs sont allés voter au 1er tour, soit moins de la moitié des Français. Posant ainsi un vrai problème de légitimité du scrutin, avec des candidats ne représentant qu’une très faible partie de la population. Ce qui est un motif politique et médiatique d’annulation du 1er tour.

Les risques pris

Par ailleurs, les participants à ce 1er tour ont pris des risques. Électeurs comme organisateurs ont été en contact avec des milliers de personnes, alors que les recommandations des autorités et des scientifiques interdisaient dans le même temps les rassemblements de plus de 100 personnes. Ce risque (mortel car on meurt tous les jours du Coronavirus en France) est un motif sanitaire et moral d’annulation du 1er tour.

La nécessaire proximité des deux tours

D’autre part, des experts du Droit et de la Constitution sont montés au créneau suite à la décision du report du 2nd tour. Selon Jean-Philippe Derosier, professeur en Droit public et spécialiste en droit constitutionnel, « un report du second tour conduirait à annuler le résultat du premier tour et obligerait les électeurs à revoter pour les deux tours ». Il explique que « la loi prévoit que le deuxième tour doit obligatoirement être organisé le dimanche suivant le premier ».

Pour Didier Maus, constitutionnaliste, il affirme que « l’élection municipale est indissociable, elle forme un tout. Mon sentiment est qu’on refait tout ou rien. Si l’on considère que l’on ne peut pas voter dimanche prochain, il faut annuler le résultat d’aujourd’hui ».

Quant à Dominique Chagnollaud, Président du Cercle des constitutionnalistes, « ce report aurait pour effet de porter atteinte à la sincérité du scrutin et invaliderait les résultats du premier tour, sauf dans le cas où un maire aurait été élu ». Ce qui est un motif constitutionnel et juridique d’annulation du 1er tour.

Les changements de discours du gouvernement

Enfin, le gouvernement il y a encore quelques jours affirmait que les élections ne seraient jamais reportées. Or au lendemain du 1er tour, Emmanuel Macron a annoncé le report du 2nd tour. Ce qui était vrai hier ne l’est donc plus aujourd’hui… On peut raisonnablement penser que les choses vont évoluer et aboutir à un report total des Municipales. Ce qui est un motif logique et pragmatique d’annulation du 1er tour.

Le contexte réunionnais

En outre, la Réunion vient de vivre l’une de ses campagnes les plus agitées de son Histoire. Des quartiers étaient littéralement interdits aux candidats et leurs militants par des voyous ultraviolents, ce qui empêchait d’y mener campagne. Ces zones de non-droit étaient donc bouclées, sous dictature de certains tyrans.

Parallèlement, les banques et les imprimeries nécessaires aux élections ont particulièrement traîné cette année, prétextant des raisons plus ou moins crédibles… Tandis que des banques prétendaient devoir faire patienter un mois pour l’ouverture d’un compte de campagne (alors que cela ne prend que le temps que d’un clic…), des imprimeries affirmaient être en rupture de stock de papier (alors même qu’elles acceptaient des commandes d’autres candidats…).

Aussi, un candidat très prometteur à Saint-Denis et ayant réussi une plutôt bonne campagne médiatique, n’a pu faire distribuer ses professions de foi par la Préfecture, suite à un excès de zèle et une intolérance suspecte d’une responsable de la commission de propagande. Le même aspirant à la Mairie de Saint-Denis a dû changer de mandataire financier en pleine campagne officielle, la personne ne voulant plus remplir ses obligations pour des raisons obscures (achetée par un leader politique ?). Obstructions qui ont gravement retardé le candidat, ne pouvant lancer l’impression de sa propagande qu’à quelques jours du scrutin, condamnant ainsi sa candidature à demeurer inconnue d’une grande majorité des électeurs.

Sans parler des habituels bourrages d’urnes, achats de voix par milliers, censure médiatique, violences et harcèlements divers. On n’a sûrement pas vu autant d’entraves à une campagne électorale depuis des décennies à la Réunion. Ce qui est un motif politique, moral et historique d’annulation du 1er tour.